Rencontres PARATGE
26-29 juillet 2018
Bugarach
Salle des fêtes
(Mairie-école)
Jocelin MORISSON
« Il n’y a pas
un modèle de civilisation
qui soit enviable pour tous.
Il reste à inventer » !
La religion, comme tu le dis bien, repose sur « une distance entre soi et Dieu » en raison de la seule chose qui nous empêche de « découvrir [notre] véritable nature : la peur » (comme le dit bien ce proverbe sioux, « la religion est pour ceux qui ont peur d'aller en enfer, la spiritualité est pour ceux qui y sont déjà allés »). Se demander si les religions ont généré sciemment et entretenu cette peur afin de justifier leur pouvoir, ou si cette peur existait déjà et a rendu les religions nécessaires afin de nous apprendre à la maîtriser, est secondaire : c’est les deux à la fois — l’essentiel étant qu’à partir du moment où la peur disparaît, la religion n’a plus de raison d’être. Question à deux centimes : que fais-tu quand tu as peur ?
C’est peut-être présomptueux mais je crois pouvoir dire que je me suis débarrassé de la peur depuis plusieurs années. J’ai aujourd’hui la conviction que l’existence se poursuit après la mort du corps, et puisque je considère que la peur de la mort est la mère de toutes les peurs, je ne ressens plus de peur à proprement parler. S’il peut encore m’arriver de ressentir des craintes pour mes proches, ou pour le fait que le bonheur familial par exemple est fuyant et que le malheur peut survenir à tout moment, j’essaie immédiatement de prendre de la hauteur et de me rappeler que, de toute façon, tout ceci est une immense farce sur laquelle nous n’avons pas de contrôle. Nous ne pouvons agir qu’à notre petite échelle et nous devons renoncer à vouloir à tout prix changer le monde. Nous pouvons simplement espérer nous changer un peu nous-mêmes, en nous connaissant mieux. Je n’ai pas peur non plus pour l’avenir de la planète ou de l’humanité. Ultimement, ça m’est égal parce que ça nous échappe largement. Selon un certain point de vue spirituel, le monde est à chaque instant parfait tel qu’il est, en dépit de toutes ses horreurs et injustices, parce qu’il nous met dans les conditions de notre élévation individuelle et collective. Ça ne m’empêche pas d’être un humaniste, un altruiste ou même un écologiste, mais encore une fois, je ne peux que me changer moi-même, et espérer que ça contribue un peu à changer le monde autour de moi. J’entends par ’’se changer soi-même’’ découvrir et vivre au plus près de sa véritable nature ; c’est un travail d’introspection, d’exploration, qui peut conduire à une forme d’élévation, et c’est là notre seule responsabilité. Enfin, mon père m’a appris que la peur n’évite pas le danger, et je suis aujourd’hui convaincu que non seulement elle ne l’évite pas mais qu’en fait elle l’attire. Selon une espèce de loi d’attraction, la vie va nous mettre face à l’objet de nos peurs pour que nous l’affrontions. Il faut donc essayer de concilier la gravité, quand les circonstances l’imposent, avec une certaine légèreté le reste du temps. L’humour sauve de beaucoup de choses, et la gaité est une politesse, comme le disait Jean d’Ormesson.
Tu caractérises à juste titre la spiritualité « en termes de reliance et d'interdépendance fondamentale », rejoignant Raymond Abellio et son critère de l’ « interdépendance universelle ». Quelles sont d’après toi les conditions d’une telle prise de conscience ? Peut-on en favoriser l’émergence, ou une telle épiphanie est-elle nécessairement soudaine et fortuite — ou un peu des deux ?
Certainement les deux, parce qu’il y a une prise de conscience progressive et collective de cette interdépendance fondamentale, et qu’elle nous conduit à un seuil où se produit une sorte de saut quantique qui tient de la révélation, en effet. Je donne l’exemple en conférence d’un morceau de pain que l’on tient dans la main. Si l’on souhaite remercier pour ce morceau de pain, il faut remercier tout ce sans quoi le pain ne serait pas là dans notre main : la personne qui nous a vendu le pain, le boulanger, l’eau, la farine, le sel, le levain, le four, le meunier, l’agriculteur, le blé, les machines agricoles, la pluie, la terre, le soleil, etc. Et pour chacun de ces éléments, il y a encore ce sans quoi cet élément n’existerait pas, ce qui fait qu’au bout du compte on doit remercier l’univers entier pour ce simple morceau de pain. C’était bien sûr le sens des grâces et du bénédicité dans le christianisme. Et c’est aussi le sens de l’interdépendance, qui fonde le concept de vacuité dans le bouddhisme : rien n’existe par lui-même. Je suis frappé de voir combien la physique quantique moderne rejoint ce point de vue en expliquant qu’il n’existe pas d’objets physiques, au sens propre, mais seulement des événements qui sont en interrelations constantes les uns avec les autres. La vacuité du bouddhisme n’est pas le vide, le néant, mais l’absence d’existence propre. Je pense que cette prise de conscience est accessible à tous, et chez certains elle sera peut-être progressive, et chez d’autres plus brutale. Mais je ne vois pas comment on peut nier cette évidence, qui nous ramène à l’unité fondamentale de toutes choses.
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« Un citoyen éclairé est quelqu'un qui n'a plus peur »
Le modèle anglo-saxon en train de s’étendre au monde entier — ce mondialisme totalitaire, esclavagiste et maffieux — impose « une vision de l'économie dans laquelle les acteurs ne sont pas différents des animaux sauvages », ce qui est « une incroyable régression, que l'on fait pourtant passer pour un progrès ». Comment expliquer une stupidité pareille : faire croire aux gens qu’il est juste et bien d’agir de manière aussi grossière et primitive ?
J’essaie en tout cas de le comprendre par le fait que beaucoup de gens restent dominés par leurs peurs, dont celle de mourir reste la première et nourrit toutes les autres, et qu’ils pensent qu’ils sont en compétition les uns contre les autres, et que l’acquisition de biens matériels peut atténuer cette peur. Donc même là où on est supposé avoir un régime démocratique, la majorité des gens votent sous l’effet de cette peur et élisent des pseudo-sauveurs qui sont complices d’un système qui a érigé cette compétition en règle, parce que c’est ce système même qui les porte au pouvoir. C’est un cercle vicieux et une fuite en avant insensée, qui conduit certains à parler de « reféodalisation du monde ». Cependant il est vain de blâmer les « élites », car la seule solution est effectivement de travailler sur ses propres peurs. Un citoyen éclairé est quelqu’un qui n’a plus peur et ne vote pas pour un prétendu sauveur, de même qu’un consommateur éclairé sait que c’est lui qui fait changer les modes de production car c’est la demande qui crée l’offre et non l’inverse, contrairement à ce que la lobotomisation constante de la publicité veut nous faire croire. Il me semble que, si les consommateurs s’éclairent, le chemin reste long pour les citoyens.
Autre accablante absurdité : « la crise écologique, le terrorisme et le néolibéralisme sont trois aspects d'une seule évolution découlant de choix effectués dans les années 1980 ». Autant dire que tout cela a été voulu et planifié. A quels obscurs motifs peuvent répondre de tels choix, qui n’ont pour résultat que la souffrance et la violence, encore et toujours entretenues et exploitées au lieu d’être reconnues et assumées ?
On peut y voir une planification et des motifs obscurs, ou bien plus prosaïquement la manifestation d’un égoïsme exacerbé. Je ne souscris pas à une lecture conspirationniste du monde, mais je ne suis pas pour autant dupe des manipulations de certaines élites, ni de leur éventuelle collusion avec des forces occultes. Donc je comprends qu’on veuille attribuer la marche délétère du monde à l’action de ce type de forces, mais c’est une façon de se dédouaner de notre responsabilité à la fois individuelle et collective. Je ne parlerais pas de planification mais d’un moteur qui est alimenté par une volonté de possession, et cette fin justifie les moyens et le cynisme des élites. Ceux qui ont la main sur ces leviers, la finance internationale, l’État profond, etc., pensent simplement qu’ils ont plus de valeur que les autres, et qu’importe le sort fait aux humains les plus fragiles, au vivant dans son ensemble et à la planète. Donc peut-être que les « obscurs motifs » consistent simplement à vouloir posséder plus que son voisin, avoir une plus grande maison et de plus belles voitures, parce que ce genre de motif, de moteur, est sans limite. Il n’est jamais comblé parce qu’il ne repose pas sur le sens véritable de ce que nous sommes.
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« Sur de longues échelles de temps, beaucoup de critères s’améliorent »
Il s’ensuit que les autorités (qu'elles soient civiles ou religieuses) et les pouvoirs publics n’ont plus aucune légitimité, ne subsistant que par leur monopole de la violence physique (sans parler de leur violence psychologique, aussi insidieuse que dévastatrice). Et puisqu’il n’est pas question de leur contester ce triste privilège — sur ce terrain, ils auront toujours le dernier mot —, sommes-nous donc voués à encaisser les coups sans broncher ?
Certainement pas, mais je suis en effet partisan d’une révolution douce, pacifique, à un éveil des consciences — même si cette formule est galvaudée —, parce que je crois fondamentalement que la violence appelle la violence. Il y a des grands modèles dans l’histoire qui ont obtenu plus par l’action non violente que par la violence à laquelle ils ont pu aussi parfois céder dans leur propre parcours : Gandhi, Martin Luther King, Mandela… Se changer soi-même en se connaissant soi-même, c’est changer en nous le citoyen, le consommateur, l’être de création et de culture que nous sommes tous. Je n’en suis pas au point de tendre l’autre joue si on se montre violent à mon égard, mais je suis convaincu que la non-violence permet d’aller plus loin. Par ailleurs, je pense que certaines autorités et certains « pouvoirs publics » ont encore une certaine légitimité. J’ai une conscience aiguë du fait que le monde n’est pas parfait mais surtout qu’il n’a jamais été parfait. Si on me dit que c’était mieux avant, je demande : où et quand ? L’instruction, la santé, le droit des minorités, des femmes, le travail des enfants… Il y a une foultitude de domaines dans lesquels on peut considérer que certains « progrès » ont été réalisés. Il y a aussi des retours en arrière, certes, mais sur de longues échelles de temps, beaucoup de critères s’améliorent — seulement nous sommes soumis à un biais de surinformation qui nous fait voir le monde plus noir qu’il n’est. Il y a des indicateurs au rouge écarlate en matière d’écologie et d’inégalités en particulier, et il faut agir d’urgence dans ces domaines, mais il est inutile d’avoir la nostalgie d’un âge d’or qui n’a jamais existé.
Sylvie Simon rapportait qu’elle avait eu de nombreux interlocuteurs dans l’administration publique (celle de la santé, en particulier) lui disant qu’ils ne pouvaient pas afficher leur position au risque de perdre leur emploi mais que cependant, ils étaient d’accord avec elle et attendaient la première occasion d’entrer en action. Nous sommes nombreux à être ainsi en état de sécession intérieure plutôt qu’extérieure. Si, en apparence, tout le monde continue de faire avec cette société, beaucoup de monde, au fond et en silence, a pris acte de son entrée en agonie et ne fera surtout rien pour la sauver. De son côté, Guénon disait qu’il suffisait qu’un assez grand nombre d’individus prennent conscience de ce qu’est le monde moderne pour qu’il cesse aussitôt d’exister. D’après toi, une telle rupture — à la façon du centième singe — est-elle à l’horizon ?
Oui, mais l’horizon est peut-être encore lointain, et il y a une grande inertie qui fait qu’on ne peut pas s’attendre à une rupture brutale qui verrait l’avènement d’un monde meilleur. Je crois au renouvellement des générations. On voit bien qu’il y a une prise de conscience massive chez les jeunes de l’impossibilité de continuer à fonctionner de cette façon sans provoquer un chaos généralisé, mais dans le même temps ils sont soumis à l’injonction de « réussir leur vie », d’être un winner, etc. Donc c’est pour eux une double contrainte, mais c’est pour cette épreuve qu’ils sont venus ici. A chacun d’apporter sa pierre, ou de faire sa part de colibri, comme dit l’autre. Je montre à la fin de mon livre, et on le voit dans certains films documentaires, qu’il existe beaucoup d’alternatives qui fonctionnent et qui transforment le monde à bas bruit. C’est une période de grande transition et je crois que tout n’est pas à jeter dans l’existant. J’essaie de ne pas être manichéen et de faire preuve de discernement. Encore une fois le monde nous semble abject parce que nous avons accès à des informations de façon globalisée et quasi immédiate alors qu’auparavant nous étions simplement dans l’ignorance, mais la violence et l’injustice n’en étaient pas moins présentes, au contraire : plusieurs études montrent qu’elles l’étaient bien davantage. Des outils comme l’informatique et l’Internet révolutionnent le monde pour le meilleur et le pire, et ce mouvement de globalisation se heurte à des disparités énormes entre les cultures et les civilisations, qu’il met en lumière. On ne peut pas s’attendre à ce que tout le monde se mette au même diapason planétaire en quelques années, parce que cette note elle-même est pour l’instant inaudible ; il n’y a pas un modèle de civilisation qui soit enviable pour tous. Il reste à inventer.
Tu montres que la société occidentale moderne n’a su envisager les états modifiés de conscience et les expériences à caractère mystique ou spirituel que sous l’angle de la pathologie. Cela explique aussi que les autistes ou les trisomiques soient mis à l’écart alors qu’ils sont d’un niveau de conscience bien supérieur à celui que requiert cette société de zombies pour fonctionner. C’est donc le monde à l’envers : les éveillés sont mis sous camisole chimique et défoncés aux cachetons tandis que la psychopathie — droit du plus fort et loi de la jungle — est encouragée et favorisée par tous les moyens, dès le berceau... Le constat étant posé, cela est-il enfin en train de changer, pas seulement à titre individuel mais de manière institutionnelle ?
Le regard sur la psychopathologie change sous l’influence de certains individus, certains soignants plus éveillés que d’autres. J’ai fait par exemple une enquête sur les « entendeurs de voix » et interrogé des psychiatres qui acceptent le caractère inexpliqué et éventuellement « transcendant » du phénomène, sans poser un diagnostic de schizophrénie. Ces gens-là restent minoritaires dans le système de soins, du fait de sa grande inertie, mais le changement vient de ce type d’individus. Notre approche de la maladie mentale nous caractérise en tant que société ou civilisation, et on voit bien en effet combien la frontière est mince entre folie, génie et mysticisme. Beaucoup de psys adoptent aujourd’hui le point de vue de chamanes qui disent que la folie est l’inconscient à ciel ouvert. Le critère n’est plus tant le contenu des expériences vécues mais le caractère de fonctionnalité dans la société, même si ce n’est pas un signe de bonne santé que d’être adapté à une société malade, comme disait Krishnamurti. C’est en tout cas un signe de force mentale que d’essayer de fonctionner dans cette société malade en essayant de la changer par un travail sur soi-même, mais avec l’idée qu’ultimement je ne suis pas responsable de l’état du monde, ce qui amène un lâcher-prise, l’acceptation de se laisser traverser par la force de vie, et l’espèce de légèreté dont je parlais au début.
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« Il suffirait d’un petit supplément d’âme, de bienveillance,
pour que le monde aille beaucoup mieux »
Il y a, dans le refus des matérialistes à concevoir que l’âme ou la conscience ne sont pas produites par le cerveau, quelque chose de l’ordre de la mauvaise foi et de l’hypocrisie, à un niveau d’irrationalité et de puérilité que l’on s’étonne de constater chez des adultes (et soi-disant scientifiques). Comment expliques-tu cette peur de leur part, autrement que par le risque de perdre leur emploi de sous-fifres des industriels ?
Il y a plusieurs facteurs mais le premier est sans doute la crainte d’un retour de l’irrationnel au sens de l’obscurantisme religieux. Les religions ont une grande responsabilité dans cette attitude bornée des matérialistes parce qu’elle est une réaction à l’ancienne mainmise religieuse sur le fonctionnement des sociétés, et qui reste en vigueur dans certains pays. En second lieu, c’est une remise en question énorme pour les scientifiques matérialistes, parce que c’est un renversement complet de perspective de considérer que la conscience est première, qu’elle préexiste à la matière. Ceux qui ont une longue carrière derrière eux devraient jeter tout ce en quoi ils ont toujours cru. Enfin, il faut réécrire la science, notamment la physique et les neurosciences, pour que le facteur conscience apparaisse dans les modèles et les théories. Or, ce facteur conscience est difficile à cerner, à concevoir, autrement qu’à un niveau philosophique. La conscience est absente de notre tableau du monde parce qu’elle est le tableau du monde, elle est la toile du fond du réel. Il y a donc une sorte de point aveugle parce qu’elle est ce sans quoi il n’y a pas d’expérience du monde. Le projet scientifique depuis la Grèce antique a consisté à objectiver le monde, ce qui a supposé d’exclure le sujet. Mais la physique quantique a définitivement mis à mal ce projet en montrant qu’il n’y a pas d’objectivité réelle, seulement une actualisation du réel à travers une expérience de conscience, qui est par définition subjective. Donc le monde tel qu’il est en dehors de cette expérience nous est inaccessible et beaucoup de chercheurs reconnaissent qu’il faut renoncer à vouloir le décrire « en soi ». En d’autres termes l’ontologie du réel ne peut se concevoir hors de la conscience que nous en avons. C’est donc un problème scientifique extrêmement complexe qui ne peut avoir de solution simple. Les scientifiques doivent commencer par accepter les données relatives aux états modifiés de conscience, et notamment les expériences dites « hors du corps » qui sont aujourd’hui probantes mais difficiles à interpréter.
« L’enjeu, dis-tu, est aujourd’hui de retrouver le sens d’une éthique universelle qui transcende les religions, parce qu’elle correspond à notre nature et se situe à ce titre en amont de toute culture. » Enraciner notre reliance et notre sacralité, la religiosité ou la spiritualité, dans la nature humaine et non la culture humaine : c’est d’une justesse et d’une pertinence imparables. Peux-tu néanmoins nous dire comment tu caractérises cette « éthique universelle » ?
On voit bien lors d’événements dramatiques, comme les récentes inondations, que la bienveillance et la solidarité sont des réflexes naturels de l’individu. Si on voit un type prêt à se jeter d’un pont, on va tenter de l’en dissuader. Si quelqu’un tombe devant nous dans la rue, nous allons l’aider à se relever. C’est parce que nous savons, intuitivement et inconsciemment, que l’autre est juste un autre moi-même, que nous sommes fondamentalement reliés, que nous sommes comme les doigts d’une même main (comme disait Ralph Waldo Emerson, le philosophe transcendentaliste du début du 19e siècle). Cette philosophie considérait que la bonté était inhérente à la nature humaine et à la nature tout court. Les comportements compétitifs auxquels la société nous pousse sont donc contre-nature et contre-productifs. Une éthique universelle devrait se fonder simplement sur cette acceptation de notre nature profonde, sur cette interdépendance fondamentale qui nous relie aux autres et à la nature. Il suffirait d’un petit supplément d’âme, de bienveillance, pour que le monde aille beaucoup mieux. Quand je dis ça en conférence, on me reproche une certaine naïveté, mais elle est assumée — et je m’estime en bonne compagnie avec Emerson ou encore Aldous Huxley, qui a dit, en substance, à la fin de sa vie : « C’est tout de même ennuyeux d’avoir passé sa vie à étudier toutes les traditions spirituelles du monde, les états modifiés de conscience, etc., et de ne rien trouver de mieux à dire que : essayez d’être un peu plus gentils les uns avec les autres. » C’est aussi bien sûr l’essence du message christique. Je dis : pas mieux.